Le diagnostic de durabilité est l’un des diagnostics les plus utilisés dans l’enseignement agricole. Emmanuel Lebrun, enseignant en zootechnie au Lycée Théodore Monod du Rheu (35) le mobilise chaque année avec ses étudiants de BTS PA 1ère année dans le cadre des modules Production animale et société et Conduite de l’exploitation (M51 et M52).
Les deux séances de travail qui encadrent les visites de ferme sont pour lui une bonne manière de travailler avec les étudiants sur l’approche globale comme le demandent les programmes :
“les étudiants doivent faire un effort d’analyse qui dépasse l’analyse classique des résultats économiques. Entre le maître de stage, les profs et les intervenants, les étudiants sont confrontés à une pluralité de discours. Par exemple, vu l’évolution actuelle des systèmes agricoles, les gens travaillent de plus en plus, sur des structures de plus en plus grandes et oublient souvent la qualité de vie. Les élèves intègrent ça dans leur discours. Il est donc important de les obliger à se poser un certain nombre de questions. Le diagnostic est un moyen de le faire”.
Jérémy Gouelne, ancien élève de BPREA maraîchage biologique, et actuellement en cours d’installation, l’a utilisé pour se donner une approche globale de sa ferme de stage :
“Cet outil donne une bonne idée générale. Le calcul de certains indicateurs comme le bilan azoté donne une bonne image de la fertilité même si on pourrait le compléter. Je souhaiterai prendre le temps de me poser dans 2 ou 3 ans pour prendre du recul sur ma future ferme. Car même si tu penses que tout va bien, il peut y avoir des choses qui sont cachées et que ce diagnostic peut révéler.”
Un outil qui peut s’utiliser en groupes
Dans le réseau Civam, la constitution d’un nouveau groupe, l’arrivée de nouveaux adhérents, une nouvelle phase de financement sont des occasions pour réaliser des points d’étapes individuels sur les fermes et de réexaminer en collectif les objectifs du groupe pour évoluer dans ses pratiques. En Sarthe, le groupe GIEE Autonomie du Civam AD72 regroupant une vingtaine d’éleveurs (laitier, allaitants, volaillers) s’est lancé dans les diagnostics durabilité des fermes. L’animation de la restitution aux éleveurs en janvier 2017, “a permis d’engager la conversation sur des choses pas abordées habituellement, en particulier sur le volet social“ témoigne Emilie Denis, l’animatrice du groupe. La transmission et le temps de travail et son organisation sont les thématiques qui ont le plus marqué les esprits des participants. Ils y ont consacré deux journées d’échanges en 2017.
Le diagnostic de durabilité et ses 3 étoiles à 7 critères
Diagnostics des fermes 30 000 à l’Adage
En Ille et Vilaine, les groupes d’éleveurs de l’Adage ont décidé de faire une photo de lancement de leurs groupes 30 000 avec le diagnostic de durabilité pour faire le point et dégager des thématiques à travailler pendant le projet. Pour Samuel Dugas, président de l’association, et éleveur à Bais (35), “c’est une manière intelligente de profiter de l’obligation des financeurs à réaliser un diagnostic en permettant aux animateurs de mieux connaître les fermes et en particulier les nouveaux des groupes“. 70 diagnostics ont ainsi été réalisés dans les 6 groupes et restitués individuellement sous forme de fiche et collectivement en animation de groupe.
Un outil qui permet de conscientiser le travail
Même si les indicateurs chiffrés comme l’efficacité économique parlent tout de suite à Guillaume Houitte, nouvel adhérent du groupe de Rennes, “les autres indicateurs comme ceux autour du temps et des conditions de travail me font réfléchir. C’est important de se poser parfois ces questions, cela permet de nous faire réagir, et en groupe on peut se comparer se situer les uns par rapport aux autres”.
Samuel Dugas confirme : “Même si on a retrouvé les résultats habituels [de la grille utilisée dans les Civam ] sur les indicateurs technico-économiques, le diagnostic de durabilité a le mérite d’aborder ces questions sous un autre angle et de manière douce. Même si le calcul de l’indicateur efficacité du travail* est à dire d’agriculteur, il nous permet de conscientiser que l’on travaille souvent au-delà du socialement acceptable. J’aimerai creuser encore plus cette question en groupe pour nous désaliéner du « c’est dur mais c’est comme ça “.
Chaque indicateur, que cela soit dans sa construction ou dans les résultats des fermes, est une invitation aux échanges entre agriculteurs pour questionner ses pratiques. Les données issues des diagnostics peuvent être valorisées lors de journées d’échanges, de portes ouvertes, de réunion politique et ainsi montrer comment l’agriculture durable se décline quelles que soient les productions concernées.
Pour maîtriser le diagnostic, comprendre les dessous des indicateurs, maîtriser les chiffres, mieux vaut se former !
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Un article rédigé par Alexis Meyer, Réseau Civam, et initialement paru dans la Lettre de L’Agriculture Durable N°84
* L’indicateur d’efficacité du travail est le résultat du calcul : Revenu Disponible/Actif Familial/heures annuelles de travail (évaluées par l’agriculteur) en % du SMIC.