Le droit de la mutualisation des transports de marchandises en circuit court

Au sein des chaines alimentaires courtes de proximité, les pratiques collectives visant à optimiser la distribution des produits de la ferme aux consommateurs se développent (co-voiturage de produits, mutualisation des véhicules etc.). Elles présentent un fort potentiel innovant en favorisant la coordination entre acteurs sur un territoire, en réduisant l’impact environnemental ainsi que les coûts économiques de ces circuits. Pourtant, aujourd’hui des questions réglementaires limitent le développement de ces pratiques. L’essor des circuits courts fait en effet émerger des questions qui se posaient peu jusqu’alors : aujourd’hui, les agriculteurs ont-ils le droit de mutualiser le transport ? A quelles conditions ? Dans quelle mesure ces pratiques sont-elles du transport pour compte d’autrui et concurrencent-elles les activités des transporteurs ? Le code rural et le code du transport régissant les activités agricoles et de transport sont-ils antagonistes ? Répondre à ces questions simples au premier abord, conditionne pour partie l’essor et la durabilité des circuits courts de proximité. Différents niveaux de coopération sur le transport sont actuellement observés au sein des circuits courts, allant du co-voiturage de produits au partage de véhicule (au sein d’une CUMA par exemple), de la mutualisation des moyens de transport jusqu’au partage de main-d’œuvre. Le développement de ces pratiques répond à des enjeux économiques, sociaux et environnementaux. Pour les agriculteurs, elles permettent de réduire les coûts des livraisons qui sont chronophages et couteuses (Blanquart et al 2015 ; Raton et al, 2016). Pour la collectivité, l’enjeu est la réduction des émissions de ces circuits qui se caractérisent par des trajets répétés en petits véhicules, avec de faibles taux de chargement et des retours à vide (Ademe, 2012). Enfin, elles répondent aux enjeux d’accessibilité de ces circuits à des populations en difficulté, agriculteurs comme consommateurs et peuvent favoriser la cohérence des politiques alimentaires territoriales (Chiffoleau, Prevost, 2012). La littérature scientifique montre, qu’au-delà de la solution de bon sens, les pratiques collectives de transport contribuent à la durabilité des circuits courts (Lacombe, 2013 ; Messmer, 2013 ; Nordmark et al. 2012 ; Bosona et al. 2011). Mais, les dispositifs réglementaires permettent-ils leur développement ? Les producteurs et leurs structures représentantes doutent parfois de la conformité de leurs pratiques de mutualisation avec les dérogations existantes. Ce rapport est un document de travail. Il vise à mettre en évidence les questionnements réglementaires limitant aujourd’hui les pratiques de mutualisation du transport notamment par rapport : à l’interprétation des textes existants, à la capacité des textes à régir toutes les pratiques de mutualisation. Il est le fruit d’entretiens menés auprès de juristes et d’un atelier mettant en discussion l’ensemble des problèmes posés. Il s’inscrit dans le cadre d’un projet mené par le laboratoire SPLOTT de l’IFSTTAR et subventionné par la Direction générale des infrastructures de transport et de la mer (DGITM).

Thématiques : Accompagnement vers l'agroécologie

Auteur : Elodie GAZULL et Gwenaëlle RATON, IFSTTAR

Date : 30 octobre 2024